9 alpinistes sont morts ce printemps 2024 sur les pentes de l’Everest, ils étaient tous clients d’une agence népalaise.
Le bilan de cette saison à l’Everest approchera probablement les 670 sommets, à en croire certains décomptes. Dont au moins 600 par le versant népalais, côté sud. 8 grimpeurs sont décédés sur leur chemin vers le toit du monde. Plus un neuvième qui filait vers le Lhotse (Everest et Lhotse partagent une partie de la voie d’ascension). Sur ces 9 personnes, on compte 7 clients et 2 sherpas.
Leur point commun ? Ils sont tous clients ou employés d’une agence népalaise opérant à l’Everest. Si les opérateurs locaux sont désormais plus nombreux que les agences occidentales, jadis majoritaires, l’accidentologie semble les pointer du doigt. Avec des tarifs tirés vers le bas, parfois la moitié voire le tiers du prix des opérateurs occidentaux, plusieurs agences locales rognent sur certaines dépenses. On constate ainsi « du manque d’oxygène, de matériel, de personnel. Des guides non payés » ou sans expérience.
Des opérateurs logistiques, pas des bureaux de guides
Ces agences n’ont surtout pas le même état d’esprit s’agissant de guider leurs clients. Alan Arnette résumait ainsi en fin de saison dernière : il y a « une incompréhension des consommateurs quant aux options disponibles sur l’Everest. C’est-à-dire la différence entre les opérateurs à bas prix qui sont essentiellement des prestataires logistiques et les autres. [Les entreprises low-cost] sont confrontées à la grande majorité des incidents. Elles admettent ouvertement qu’elles ne sont pas responsables de la sécurité des grimpeurs (…). Par opposition à un service de guide plus traditionnel qui assure la logistique, mais met l’accent sur le professionnalisme, l’accompagnement et la sécurité en montagne ».
Quand certains fournissent des tentes et des bouteilles d’oxygène, d’autres se concentrent sur la sécurité des clients, en résumé. Et effet pervers, les agences les moins chères attirent souvent les clients les moins bien préparés. Sans compter qu’elles sont moins regardantes sur leur niveau et leur préparation. Cocktail parfait pour des catastrophes en série.
Des guides pas responsables ?
Les agences concernées par les morts de la saison sont :
- 8K Expéditions (5 morts),
- Seven Summits Treks (2 morts),
- Yeti Adventure (1 mort),
- Makalu Adventure (1 mort).
Lorsqu’en France un guide de haute montagne est confronté à la mort d’un de ses clients, une enquête est ouverte. Dans certains cas, elle peut même conduire à mettre en cause la responsabilité pénale du professionnel. Le guide et le procureur, paru en 2020, explore ce thème. D’autres pays européens fonctionnent sur le même modèle. Il n’en est rien au Népal.
Des autopsies sont parfois réalisées suite à des décès en altitude. Mais la conclusion ne questionne jamais la responsabilité des guides ou des sherpas. Le mode de paiement de ces derniers (un bonus si le sommet est atteint) n’est d’ailleurs pas favorable aux sages décisions de demi-tour. Quant aux règles plus strictes régulièrement mises en place par le gouvernement pour faire baisser le nombre de victimes, elles peinent à être suivies d’effets.
Illustration © Pixabay