Le trail : attention et concentration
La spécificité du terrain montagnard est qu’il implique une lecture du sol particulièrement vive, précise, détaillée et par conséquent une anticipation du pas à venir tout autant que la justesse du pas en cours. Le regard alterne par conséquent dans d’incessants allers-retours qui ne sont même pas conscients. C’est une mécanique indispensable et l’esprit s’y attelle avec une attention constante. Qui peut se révéler épuisante. La lassitude de l’attention et de la concentration. Deux aspects différents du travail de l’esprit durant un trail.
L’attention est un phénomène qui permet à l’individu de saisir l’ensemble des données visuelles de son environnement : cailloux sur le chemin, rigoles, boue, ruisseau, fossé, racines, blocs, graviers, herbes mouillées, de lire la pente, sa raideur, sa longueur, ses différentes inclinaisons…
La concentration est un phénomène qui instaure un regard intérieur : la gestion de l’effort, les sensations musculaires, le souffle, la longueur de la foulée, la poussée des bras, la décontraction des épaules, de la nuque, la maîtrise du potentiel énergétique, sans gaspillage, avec lucidité.
La lucidité est donc un élément capital et il existe dans l’impossibilité de relâcher cet effort un épuisement cérébral qui peut se révéler redoutablement destructeur. C’est parfois le mental qui lâchera avant le corporel.
Qu’en est-il des paysages traversés ?
Qu’en est-il de l’amour porté à la montagne ? La réponse est évidente au regard de la difficulté de l’épreuve. Quelqu’un qui n’aimerait pas la montagne ne ferait pas de trail. Ceux et celles qui courent là-haut l’expérimentent simplement d’une autre façon que le randonneur. Là encore, il n’est pas question d’établir une hiérarchie. C’est être en montagne qui nous rend heureux. Peu importe si c’est en marchant, en courant, en vélo, à skis, en raquettes…
Il est évident en tout cas que cette pratique a pris une ampleur importante et j’ai vu apparaître des coureurs dans des secteurs de montagne quelque peu délaissés depuis une bonne dizaine d’années. Depuis que nous habitons dans le Val Gelon, nous avons vu des chemins quasiment s’effacer sous la végétation par disparition progressive des marcheurs. D’autres secteurs restent plus visités bien entendu mais la fréquentation de la montagne est, il me semble, dans une dynamique baissière notamment les vallées méconnues ou les secteurs trop sauvages pour les touristes lambda : versant Grésivaudan de la Chartreuse, vallée du Pleynet, Ferrrière, Gleysin, Fond de France, Lauzière, Bauges, Maurienne… Il nous est arrivé de sortir sans croiser âme qui vive de la journée et même pendant les week-ends ou les vacances scolaires. Dix personnes sur une journée de marche en Chartreuse, c’est parfois exceptionnel.
La mode du trail a changé la donne
Des coureurs en tenue colorée arpentent les chemins les plus ardus, le sourire aux lèvres et le pas vif. Et c’est un grand bonheur de les voir courir. Bien évidemment, les ultra trail médiatiques et quelques personnalités charismatiques ont contribué à cet essor mais l’amélioration considérable du matériel tient aussi une part indéniable dans cette évolution.
Courir une heure sur un sentier balcon ou courir une heure dans la pente qui mène au col de Morétan…
Quelques-uns réalisent le premier et sont très heureux. Très peu réalisent le second et ils sont très heureux aussi. C’est la magie de la montagne : elle rend heureux tous ceux qui y viennent puisque tous trouvent à leur échelle de quoi satisfaire leurs désirs d’efforts.
Le trail a donc ranimé le milieu montagnard. À son époque, le VTT a eu, lui aussi, un impact considérable sur la fréquentation de la montagne. Et je me demande d’ailleurs s’il ne s’effectue pas un basculement d’une partie de cette catégorie de sportifs vers le trail. De moins en moins de VTT en altitude et de plus en plus de coureurs.
C’est un séjour dans le Dévoluy qui m’a amené à penser ça. Des coureurs à l’Obiou et au Grand Ferrand, au pic de Bure, à la tête d’Oriol ou au col de Rabou, il y en avait ! Mais des cyclistes à VTT, je n’en ai vus que rarement et uniquement sur les pistes des stations de ski. Même phénomène dans le massif de Belledonne. Il est vrai que les sentiers se prêtent davantage à la course à pied et le trailer a cet avantage de passer partout.
Voilà l’essence même de la montagne. Aller puiser en soi l’énergie nécessaire et se réjouir des beautés de ce monde à part. Le trail, au regard des distances parcourues, donne à ces deux paramètres toute leur étendue.
Illustration © Trail Runner Indonesia
Super article qui m’interpelle: j’ai vu aussi lesneteir de l’échapée belle s’améliorer netteemtn aux férices et je crois mois aussi que le trail fait redecouvrir des itineraire « cachés/oubliés ». Les offices de tourismes et lamaison de la montagen d efond de france en recommandent que les randos le splu faciles aux familles ce qui se comprend bien mais illustre comment les chemins hardu s’effacent…
Le pas guiguet deséquipé par la mairie en chartreuse, les itinéraires deconseillés comme le Néron… sans parler du panurgisme qui frappe fort dans notre société ! Du coup montrer que le trailer n’est pas seulement un « érodeur de sentier » avec ses machants batons me semble important !
A ce titre une course comme l’échapée belle qui fait vraiment découvrir une région et des irinéraires très peu fréquentés est exemplaire. Ces itinéraires sont clairement évité par le GR nouvellement tracé, ainsi on voit là dans Belledonne la complémentarité entre randonnée touristique facile d’accès et le trail dans son coté plus « aventureux ».
Ayant été bénévole sur l’Échapée belle et réussi son intégrale en 2020 il me reste a râler sur les limites des ultra trail organisés à coup d’hélicos et de sono pour promouvoir des off sans assistance le plus écolo et sensationnel
qui soit !
Il en faut pour tout les goûts et Belledonne réussi cela à merveille !