Ces dernières semaines, les morts de l’Everest ont fait les gros titres de l’actualité. Quelques 11 alpinistes ont ainsi perdu la vie sur ce seul sommet de l’Himalaya en une seule saison d’ascensions. Dans un article d’UK-Climbing, Simon Lowe avance certaines hypothèses. « Cette année, la mort de grimpeurs de 50-60 ans semble augmenter. Est-ce que l’âge ou le genre sont pertinents ou ces morts sont proportionnels à la quantité de personnes de ces âges/genres présents sur la montagne ? ». Est-ce que les statistiques donnent du corps à ces hypothèses ? Nous évoquons régulièrement les prouesses de nombre de vétérans, l’âge n’a jamais semblé constituer un handicap à la pratique de la montagne (Carlos Soria 80 ans, Oscar Cadiach 66 ans,…)…
L’influence de l’âge non significative
Sur les 10 dernières années (de 2009 à 2018 inclus), la moyenne d’âge des alpinistes sur l’Everest était de 41 ans (41,2). Sur cette même période, la moyenne d’âge des alpinistes morts sur l’Everest était de 44 ans (44,1), sensiblement plus élevée. Si on regarde la médiane (moins sensible aux données extrêmes) : les alpinistes de l’Everest de ces 10 dernières années ont 41 ans, ceux qui n’ont pas survécu 43 ans. L’écart se resserre et reste non significatif, inférieur à 10%.
Cette saison, nous n’avons pas encore la liste complète des grimpeurs mais si on regarde les victimes, leur moyenne d’âge est de 48 ans (48,2), nettement plus élevée que les 10 années précédentes. A y regarder de plus près, certaines années passées étaient dans la même tendance, comme 2011 (50) et 2012 (46). Le nombre de victimes sur une seule année (en 2019 par exemple) n’est pas suffisant pour donner une portée statistique aux chiffres. Mieux vaut regarder une tendance sur plusieurs années. Dans cette optique, les victimes de cette année n’ont pas d’impact majeur sur les tendances.
Le genre, facteur de prudence ?
Si les femmes représentent 15% des grimpeurs au camp de base (ces 10 dernières années), elles font moins de 12% des victimes. A l’inverse, les hommes (85% des grimpeurs) représentent quelques 88% des victimes.
Simon Lowe plaide pour un système qui permette de recueillir le plus d’informations possibles sur ces morts, leurs causes exactes, les profils détaillés des victimes, etc… Il permettrait de mieux comprendre d’où viennent ces décès et d’être plus efficace dans la manière de les prévenir. L’âge ou le genre ne semblent pas être des éléments utiles dans un tel travail sur l’accidentologie de l’Everest. En revanche, le niveau d’expérience, l’état de santé des grimpeurs serait intéressant à connaître. De même, déterminer avec précision : le lieu et les conditions de la mort (altitude, température, vent, cause de la mort…) pourrait apporter de la matière à la réflexions sur les moyens de faire diminuer la mortalité sur ce sommet emblématique.
Un tel système permettrait également d’étayer les arguments avancés par de nombreux experts et qui mettent en cause : le manque d’expérience des clients, et le manque de professionnalisme de certains opérateurs.
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(NB. Les sherpas sont exclus de ces comptages, ils sont généralement beaucoup plus jeunes et masqueraient les tendances sur les « clients », les chiffres proviennent de la Himalayan Database).
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