Il y a quelques semaines, son nom défrayait la chronique chez les grimpeurs. Keita Kurakami, japonais de 31 ans, annonçait sa victoire en libre sur The Nose à El Capitan (Yosemite, USA). Cette voie réputée extrêmement périlleuse n’avait été réussie que 4 fois de cette manière. Il semblait donc être le cinquième. En expliquant plus en détail son ascension, il admit lui-même ne pas pouvoir être considéré comme le cinquième vainqueur de la voie. En cause : le repos à mi-ascension pris en dehors de la voie. Les 4 premiers étaient restés dans la voie du début à la fin ! Qu’importe, ce jeune grimpeur valait quand même la peine d’être rencontré, histoire de faire sa connaissance.
Interview de Keita Kurakami
Altitude.News – Qui êtes-vous Keita-san ?
Keita Kurakami – Je suis un grimpeur japonais, j’ai grandi au Nord de Tokyo, entouré de belles montagnes, de rivières ! Aujourd’hui, je travaille 5 jours par semaine chez Lost Arrow Inc, un importateur de matos de montagne. Je ne suis pas un grimpeur professionnel, je m’entraîne le matin avant d’aller travailler et le soir, dès 18h et le week-end bien sûr. Mais j’ai de la chance, mon employeur (grimpeur lui aussi) accepte de me laisser prendre de longues vacances pour aller grimper à l’autre bout du monde ! Ma vie est juste : travailler, vivre et grimper.
A.N. – Alors comme çà, vous grimpez ?
K.K. – J’ai commencé il y a plus de 13 ans. J’ai d’abord fait du bloc, pendant presque 10 ans ! Et depuis 3 ans, je me consacre à une escalade plus traditionnelle. En 2015, j’ai réalisé la première de Senjitsu-no Ruri chez moi au Japon (NDLR : une voie côté 5.14a, soit traduit en français : 8b+) sur le Mt. Mizugaki. A cette époque, j’ai eu pas mal de précieuses expériences et apprentissages sur l’éthique de l’escalade libre. Notamment au sujet des protections sur la voie. Au final sur Senjitsu-no Ruri, je n’ai installé que 4 points pour m’assurer sur les 100m de la voie. Depuis, je considère vraiment le style de grimpe. En fonction de la voie, c’est toujours difficile de choisir le meilleur style.
A.N. – Vous avez aussi réalisé d’autres ascensions impressionnantes au Japon (Bansousha, 8b ou Spark, 8a), et dans le reste du monde ?
K.K. – Je ne suis pas venu en France mais j’ai pas mal grimpé au Royaume-Uni. J’ai fait quelques voies vraiment fantastiques. Comme Gaïa (8a+) ou The Walk of Life (8b) dans le Devon, c’était mémorable ! Cette année, j’étais invité dans les Cornouailles par le British Mountain Council ; j’ai plein de copains grimpeurs anglais du coup !
A.N. – Que va-t-il se passer maintenant ?
K.K. – Ma priorité est de revenir sur The Nose pour y arriver, en libre, en un seul push. Donc je vais me concentrer sur mon entrainement dans les mois qui viennent pour revenir aux USA l’an prochain pour ce projet ! Enfin bref, je n’ai qu’une envie, revenir dans cette voie ! J
The Nose
The Nose est l’une des voies les plus connues d’El Capitan, cotée 8b+, a été réalisée pour la première fois en libre par l’américaine Lynn Hill en 1993, et renouvelé en 1994. Pour atteindre ce niveau, la grimpeuse s’est longtemps entraînée dans les gorges du Verdon. Cocorico ! Deux autres réalisations libres ont été comptabilisées depuis, en 2005 et 2014. La plus rapide est à attribuer à Tommy Caldwell en une douzaine d’heures (2005). Avec ce chrono, il a divisé par 2 le record détenu jusqu’alors par Lynn Hill.