Dans ce nouvel épisode de Bonheur et Dragon, nous allons découvrir l’industrie de l’électricité du Bhoutan, mais aussi ses problèmes de frontières et son addiction… à la viande !
Attention. Ce podcast est issu d’une série que nous vous encourageons à découvrir dans l’ordre. Accédez aux épisodes précédents : Episode 1 | Episode 2 | Episode 3 | Episode 4 | Episode 5 | Episode 6 | Episode 7 | Episode 8 | Episode 9.
De l’énergie verte produite au Bhoutan
On suit les lignes haute tension que nous avons croisées, elles nous conduisent vers le sud. Nous longeons un temps la rivière Wang Chu avant d’arriver au barrage de Tala. 92 mètres de haut pour l’infrastructure de production d’électricité la plus puissante du pays. Le turbinage de l’eau a lieu 20km en aval, dans le petit village de Tala. La vente d’électricité au voisin indien est d’ores et déjà la première source de revenus du pays. Et le potentiel est énorme. Des études estiment que les barrages actuels n’exploitent que 5% de la capacité hydroélectrique du pays. Le Bhoutan compte donc bien développer ces infrastructures même si leur coût astronomique nécessite des partenariats avec des investisseurs étrangers.
Lors de sa visite d’état en 2019, le premier ministre indien Narendra Modi avait été accueilli en superstar. L’hymne indien avait retenti dans le Dzong de Thimphu en son honneur. A Tala, tout a été construit avec des fonds Indiens. Si nous avons croisé des lignes haute tension plus au nord, la plupart filent en réalité vers l’Inde. Seul importateur de l’électricité verte du Bhoutan. Deux projets sont très avancés dans la vallée voisine, ils sont financés grâce à un prêt accordé par New Delhi. Comme souvent sur ce type de projet, les délais s’allongent et les coûts s’envolent. L’ambition des autorités bhoutanaise d’arriver à 10.000 MW de production en 2020 n’a pas été atteinte mais les projets sont en cours. L’Inde est à deux pas, la frontière est à une quarantaine de kilomètres de route de montagne. Six à vol d’oiseau.
Une frontière pas claire
Contrebande et trafics en tous genres se pressent à la frontière. Pendant la pandémie, les trafics notamment de cigarettes étaient une cause majeure de transmission du covid depuis l’Inde. Malgré ces problèmes, la frontière du sud n’est pas contestée par l’Inde, il n’en va pas de même au Nord. La Chine n’a jamais vraiment accepté la ligne de démarcation entre les deux pays : « Au nord, ce sont les neiges éternelles et au sud, il y a une grande forêt. Cette forêt, c’est la frontière du sud » nous explique un Bhoutanais.
470km de frontières partagées entre Chine et Bhoutan et des discussions sans fin depuis les années 1980 pour tenter de se mettre d’accord. Depuis 2015, des images satellites démontrent régulièrement la construction de routes, de villages et de bases militaires par la Chine dans des territoires revendiqués par le Bhoutan. En 2020, les chaines de télévision indiennes s’indignaient d’une annonce des autorités chinoises concernant un territoire disputé : « Quelques semaines après avoir provoqué l’Inde dans le Ladakh, la Chine convoite à présent le toit du monde, le Bhoutan. Elle revendique la réserve naturelle de Sakteng, une des nombreuses régions protégées du Bhoutan s’étendant sur 650 kilomètres carré. Elle se trouve dans la région de Trashigang, à l’est du royaume. La Chine soutient que la réserve se trouve sur son territoire ».
Dans le pays, on n’entend pas trop parler de ces histoires, qui concernent généralement des zones inaccessibles du pays, des sujets souvent montés en épingle par l’Inde, elle-même bien souvent bousculée à ses frontières avec la Chine.
Les meat-shops bhoutanaises
Sur le bord des routes, dans le moindre village, on ne peut pas les rater. Si on met de côté les bars et restaurants, les « meat shops » sont certainement les échoppes les plus fréquentes. Des boucheries omniprésentes dans un pays qui ne tue pas les animaux. Il faut dire que les Bhoutanais sont des grands consommateurs de viande, le premier consommateur par habitant en Asie du Sud. Souvent importée d’Inde, la viande n’est que rarement produite au Bhoutan, les normes religieuses l’empêchant. Les rares abattoirs subissent des pressions de la part de la population et les projets de nouvelles infrastructures soulèvent de nombreuses oppositions, jusqu’au corps monastique qui lance des pétitions !
Le bétail bhoutanais est donc bien souvent transporté en Inde pour être abattu puis ré-importé pour être consommé. Drôle d’hypocrisie. Le végétarianisme est encore balbutiant au Bhoutan. En 2010, 2% des habitants suivaient un tel régime.
CREDITS. Images d’illustrations, Interviews, enregistrements au Bhoutan © Altitude. | Bruitages additionnels et musiques d’illustration © Pixabay. | Headphone © Flat Icon / Freepik | Traductions et doublages assurés par Clémence Bout et Albin Digue du Master Rédacteur Traducteur de l’Université de Bretagne Occidentale. | Ecriture et voix-off : Arnaud Palancade. | Sources complémentaires : Interview Wangyel Tandin, 2022 | Son television indienne | Enregistrement diffusion officielle visite d’Etat Narendra Modi au Bhoutan, 2019. | Extrait radiophonique Karma Sangay, Nyengduma | Hydropower, Key to sustainable socio-economic development of Bhutan, Ministry of Trade and Industry Bhutan | Le Bhoutan pourrait perdre sa principale source de revenus, Altitude, 2022. | Au cœur de l’Himalaya, le territoire du Bhoutan dévoré par le géant chinois, Altitude, 2021. | Bhutan China border negotiations in context, The Diplomat, 2021. | Government cannot stop establishment of private slaughterhouses, The Bhutanese, 2019.