La Préfecture de Haute-Savoie vient de valider le projet de retenue collinaire du plateau de Beauregard à La Clusaz. Une hérésie pour les opposants au projet.
Les grands projets d’aménagements en montagne suscitent de plus en plus de controverses. A La Clusaz en Haute-Savoie, la municipalité avait ainsi repoussé les avances du Club Med qui voulait installer un immense village de vacances sur la commune. Cette prise de position ne signifiait pas pour autant arrêt des projets sur la station. Le préfet a validé ce lundi 19 septembre la construction d’une retenue collinaire de 150.000 mètres cubes. Ce bassin de stockage d’eau sera implanté à 1.500 mètres d’altitude. Il doit permettre l’alimentation de la commune en eau potable, l’irrigation et bien sur la production de neige de culture.
Retenue collinaire à La Clusaz : un projet contesté
Les protestations sont nombreuses depuis le début du projet. Une pétition de quelques 55.000 signataires soulignait, en vain, que la retenue devait voir le jour dans un « sanctuaire de biodiversité ». En 2020, l’avis de l’autorité environnementale régionale rappelait aussi la « grande richesse environnementale » du site en émettant nombre de réserves. En 2021, ce projet qualifié d’ « éco-cide » par le Collectif Fiers-Aravis avait néanmoins reçu un avis favorable de la commission d’enquête publique.
Il faut préciser qu’il s’agit d’une cinquième retenue collinaire pour La Clusaz. La station stocke déjà 270.000 mètres cubes d’eau pour sa neige de culture. Ce nouveau projet est ainsi vu comme une « fuite en avant » par les associations de protection de la nature. France Nature Environnement 74 parle de la « privatisation de l’eau pour la neige de culture ». Alors que l’été caniculaire qui se termine a souligné – si c’était nécessaire – combien la ressource en eau est précieuse. Enfin, cette nouvelle retenue ne pourra se remplir par le seul ruissellement. Elle sera donc largement alimentée par la captation d’une source située à 3 kilomètres du futur plan d’eau. L’ « industrie du tout ski gagne encore » tente de résumer Résilience Montagne sur Facebook.
Qu’en pensent les scientifiques ?
Magali Reghezza, géographe et membre du Haut Conseil pour le Climat et Florence Habets, Directrice de recherche CNRS en hydrométéorologie, professeure à l’École normale supérieure donnent une autre vision de l’utilité de ces stockages d’eau : on « observe aussi un contrat tacite entre les autorités et un petit nombre d’usagers, ces dernières concédant des investissements coûteux, dès que la ressource devient insuffisante, pour maintenir, voire continuer à intensifier, l’usage de la ressource. L’infrastructure nouvellement construite fonctionne ainsi comme une dose de drogue, qui soulage momentanément le système jusqu’au prochain « fix ». Chaque fix retarde la réduction des usages et les transformations systémiques, qui seules peuvent diminuer durablement la vulnérabilité de l’activité ou du territoire. C’est la définition même de la maladaptation : le remède pérennise, voire aggrave, le risque qu’il est supposé résoudre. »
Illustration © Pixabay