En Himalaya, une région entière est en train de sombrer dans le sol. La ville de Joshimath est en première ligne et la catastrophe était annoncée depuis longtemps…
Joshimath va-t-elle disparaitre ?
Depuis des décennies, les experts alertent les autorités et les habitants de l’instabilité du sous-sol de la région. Des siècles en arrière, une prophétie sacrée évoquait même la disparition à venir de cette cité. A Joshimath, à près de 1.800 mètres d’altitude, les constructions n’ont pourtant jamais cessé. Aujourd’hui, ce sont près de 50.000 habitants qui se retrouvent piégés dans une ville bousculée par son sous-sol. 3.000 ont d’ores et déjà été évacués et logés dans des camps de fortune. La ville est construite sur une zone sismique. Mais au-delà des fréquents tremblements de terre auxquels les habitants se sont peu ou prou habitués, le secteur s’affaisse dangereusement. En quelques jours fin 2022, le sol aurait ainsi sombré de 5 centimètres. Occasionnant des dégâts généralisés sur toutes les constructions.
Ce chiffre, mesuré par satellite, n’est qu’une accélération d’un phénomène déjà bien en mouvement depuis le début de l’année 2022. D’avril à début décembre, le sol se serait affaissé de 9 centimètres. De premières études suisses dans la première moitié du XXème siècle s’étonnaient que l’on puisse construire dans la région. En 1976, des spécialistes indiens écrivaient noir sur blanc les dangers de construire dans cette région très vulnérable à l’affaissement. Près de 500 villages autour de Joshimath sont également concernés.
Une ville touristique, centre d’une région au potentiel hydroélectrique majeur
Mais cette ville sainte, destination de pèlerinage pour certains, de ski pour d’autres, n’a fait que grandir. En 2019, elle aurait ainsi attiré près d’un demi-million de visiteurs. L’office de tourisme local la présente comme « un des endroits les plus intéressants en Himalaya ». Sans compter les nombreux projets hydroélectriques qui sont nés autour de la ville. De nombreux glaciers et de puissants torrents de montagne que l’on peut canaliser pour générer de l’électricité fourmillent dans les montagnes alentour. Les images des habitants perdant leurs maisons ont fait la Une des médias indiens mettant en relief un sentiment d’injustice profond dans la société. Une société où les besoins en énergie et les profits du tourisme semblent l’emporter sur tout le reste. Les habitants de Joshimath, démunis en plein hiver, en font l’amère expérience.
Catastrophes sur catastrophes
Construite sur un glissement de terrain ancien, la ville a clairement des bases fragiles. Et la région est depuis plusieurs décennies touchée par des phénomènes naturels violents accélérés par le changement climatique. Comme une avalanche monumentale qui a emporté une centrale électrique et tué 200 personnes en 2021. Ou un véritable effondrement qui a décimé quelques 5.700 personnes en 2013. Quant aux chantiers hydroélectriques actuels, ils percent la montagne de tunnels, la fragilisant chaque jour un peu plus.
Pour l’heure, les autorités indiennes tentent de ménager des intérêts stratégiques en soutenant les industriels de l’hydroélectricité et en limitant l’emballement des médias sur le sujet. Mais les projets à plusieurs centaines de millions d’Euros supposés générer une précieuse énergie pour le développement du pays sont plus fragiles que jamais.
Illustration © Vaibhav78545 by Wikimedia Commons| CC BY-SA 4.0