Deuxième sommet de la planète, le K2 a longtemps fait fuir les « touristes de l’Everest ». En cause, un niveau technique relevé et un taux de mortalité à en décourager plus d’un. Ce sommet, haut de 8.611 mètres, est d’ailleurs le seul des « 8.000 » à être invaincu en hiver. Pendant des années, on ne comptait que quelques réussites par saison sur le K2. En 2015 et 2016, aucun alpiniste n’avait réussi à se hisser au sommet de cette montagne. Mais durant cet été 2018, les expéditions ont changé d’échelle. Plus de 60 grimpeurs sont allés au sommet, et on ne déplore « que » deux morts. Que s’est-il passé sur celui que les Baltis nomment Chogori ?
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Un début de saison compliqué sur le Karakoram
Il y avait pourtant qu’une dizaine d’équipe qui comptait s’attaquer au K2 cette saison. Pourtant, elle a battu tous les records. Après un début juillet marqué par la chute mortelle du Québécois Serge Dessureault, la météo est venue jouer les trouble-fêtes. On a bien cru que la saison allait s’arrêter là. Jusqu’en milieu de mois où les prévisionnistes ont commencé à se réjouir. Le beau temps était de retour pour quelques jours. Suffisamment longtemps pour finir d’équiper la voie et emmener les équipes au sommet.
Une montagne devenue commerciale : le nouvel Everest ?
Car au fil des années, le K2 a adopté les pratiques en place sur son cousin népalais l’Everest. Une voie équipée de corde fixe jusqu’au sommet, un ratio de « guides » de près de 2 pour 1 client et une professionnalisation croissante des équipes pakistanaises sur place. Les résultats s’en ressentent : plus de 60 réussites dans une fenêtre météo très courte. Et si un second décès est venu ternir cette fin de saison (celui du Japonais Kojiro Watanabe), le taux de mortalité de l’année est extrêmement faible. A de rares exceptions (comme l’ascension de Sergi Mingote, et quelques porteurs et sherpas), la plupart des occidentaux ont utilisé de l’oxygène pour gravir la montagne. La nouvelle norme sur le K2. Comme sur l’Everest.
Les prix des expéditions sur le K2 sont légèrement inférieurs à ceux pratiqués sur l’Everest. L’agence Madisson Mountaineering, qui a emmené quelques 24 personnes au sommet cette saison, vend une expédition au K2 à quelques 50.000 € (hors assurances, pourboires, matériel personnel et vols internationaux). De quoi attirer des aventuriers fortunés du monde entier ! Avec les réussites de cette année, nul doute que de nouveaux clients vont se presser aux portes des agences qui commercialisent ces expéditions. Rien n’indique que le K2 saura se prémunir contre les dérives constatées depuis des années sur l’Everest. Les alpinistes mentionnent déjà les dépôts d’ordures dans les camps d’altitude et les anciennes cordes fixes abîmés qui s’entassent dans certains passages ! Les amoureux de la montagne et les défenseurs de l’environnement apprécieront…
Et le phénomène pourrait ne pas être exempt de conséquences sociales. Déjà, des porteurs baltis se plaignent d’être payés moins cher que les sherpas (venus du Népal pour travailler en saison sur le K2) pour réaliser les tâches les plus dures…
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