Méconnue du grand public, Loulou Boulaz était sans aucun doute une des alpinistes les plus aguerries de son temps.
Le 13 juin 1991, elle s’éteignait à Genève, à l’âge de 83 ans. Née dans le Canton de Vaud un hiver du début du siècle, Louise Boulaz était surnommée Loulou. Brillante élève, elle intègre la Société des Nations (ancêtre des Nations Unies), à Genève, comme copiste. Puis elle met ses compétences au service du Bureau International du Travail. Elle continuera de travailler au BIT jusqu’en 1973. Mais c’est sur son temps libre qu’elle fera parler d’elle…
Les premières féminines de Loulou Boulaz
Dans les années 1930, elle se met au ski puis à l’alpinisme. Issue d’une famille modeste, elle n’est pas toujours très à l’aise avec les alpinistes genevois bien souvent très privilégiés. Elle se tient à l’écart mais démontre son talent avec ses ascensions. A une époque où le Club Alpin Suisse ne veut pas entendre parler des femmes. Féministe et communiste, elle s’en fiche ! Certains de ses amis l’appelleront « Loulou la rouge ». Un temps membre de l’équipe suisse de ski alpin, et médaillée, c’est bien dans la grimpe qu’elle va s’épanouir. Avec son amie Lucile Durand, elle réalise les premières féminines de plusieurs voies majeures dans le massif du mont Blanc, comme la face sud de la Dent du Géant au début des années 1930. En 1941, elle gravit le versant nord du Zinalrothorn (4.221m). Encore une première.
La Reine des faces nord
Puis son regard se porte sur les faces nord des Alpes qui à l’époque sont bien souvent vierges de toute ascension. En 1935, avec Raymond Lambert, elle s’offre la face nord des Grandes Jorasses via l’Eperon Croz. A quelques heures près, c’était là encore une première. Ce ne sera qu’une première féminine. Au Petit Dru, elle réalise une première féminine en face nord. Comme sur l’Eperon Walker aux Grandes Jorasses.
Et qu’importent les insultes misogynes !
En 1937, elle tente la face nord de l’Eiger, alors invaincue. Elle n’atteint pas le sommet, notamment à cause du mauvais temps mais déchaine les passions. Othmar Gurtner, journaliste suisse, éditeur et amoureux des montagnes affirma alors que si Loulou Boulaz devait faire une nouvelle tentative, ce serait une « insulte » pour l’Eiger. N’ayant que faire des remarques misogynes, elle retentera plusieurs fois cette face.
En 1959, elle suit Claude Kogan dans son projet d’expédition féminine au Cho Oyu, un 8.000 du Tibet. Une avalanche emporte cinq membres de l’expédition mais Loulou Boulaz s’en tire et sa passion des cimes avec. Quelques mois plus tard, elle est au sommet de la Cime Grande di Lavaredo. Elle vient d’en survoler la face nord pour un énième première féminine. Seule la face nord de l’Eiger lui résistera.
Illustration © [B&W] Mourad Ben Abdallah CC BY-SA 4.0 – [resized] Micheline Rambaud CC BY-SA 4.0