L’expédition britannique victorieuse de l’Everest en 1953 utilisa de l’oxygène en quantité. Dans son compte-rendu post-ascension, Griffith Pugh en donne un aperçu ! Morceaux choisis de l’Himalayan Journal de l’époque. Il faudra attendre 1978 pour la première ascension de l’Everest sans oxygène .
« Près de 200 000 litres d’oxygène ont été utilisés contre 28 000 litres en 1922, et 30 000 litres emportés par les Suisses lors de leur expédition sur l’Everest l’automne dernier ». Sur cette expédition de 1953, Pugh comptait bien tester différents systèmes sur lesquels il avait travaillé. Il disposait notamment de systèmes ouverts où l’oxygène des bouteilles se mélange à l’air et est perdu. Et des systèmes fermés à l’autonomie plus importante qui « recyclent » l’air expiré.
6 fois + d’oxygène que l’expédition précédente !
« Les ensembles à circuit ouvert pesaient environ 13kg avec deux bouteilles d’oxygène contenant chacune 800L. Cela donnerait à un homme un approvisionnement de 6,5h à 4 L/min. Les ensembles à circuit fermé pesaient 16kg avec une bouteille d’oxygène et un bidon de chaux sodée de 4,5kg. En arrivant à notre base, nous avons constaté que 18 bouteilles avaient fui, laissant environ 150 000 litres d’oxygène, dont la plupart ont été utilisés. En fait tous, sauf six cylindres. Environ un tiers de l’oxygène utilisé pour l’entraînement et une petite quantité à des fins expérimentales. (…) Une grande partie du travail de préparation de l’itinéraire sur la face du Lhotse a cependant été effectuée sans oxygène. »
Pas d’oxygène pour les porteurs !
Aujourd’hui, les porteurs comme les guides sherpas utilisent de l’oxygène. Ce n’était pas aussi simple à l’époque. Si Tenzing Norgay, qui visait le sommet, avait son propre oxygène, la plupart des sherpas qui transportaient de lourdes charges parfois au-delà de 8.000m n’en avaient pas droit.
« Pendant la phase d’assaut, il ne fait aucun doute que l’oxygène était d’une immense valeur pour empêcher la détérioration à haute altitude. Les hommes se sont remis de la fatigue d’une manière impossible sans elle. Y compris les équipements à oxygène, les grimpeurs transportaient 23kg de charges jusqu’à 8.500m, alors qu’auparavant 7kg semblaient être une limite. Pour la plupart, les porteurs Sherpa n’avaient pas d’oxygène sur le chemin du col et ils n’en avaient pas pour dormir. Seuls deux d’entre eux étaient encore suffisamment aptes à porter des charges au-dessus du col.
Le groupe a constaté qu’en dessous de 6.700m, l’oxygène avait peu d’effet sur le rythme d’escalade, mais au-dessus de cette altitude, l’amélioration devenait de plus en plus apparente, de sorte que la vitesse d’escalade au-dessus du col était deux fois ou plus celui de Lambert et Tensing en 1952 (…) ». Aujourd’hui encore, l’oxygène utilisé sur les expéditions commerciales intervient généralement après le Camp 2, en direction du Camp 3. Certains clients veulent l’utiliser plus bas, mais c’est vraiment à partir de là qu’il est le plus efficace. Le constat des 6.700m de Pugh est toujours d’actualité !
Une vitesse d’ascension 2x + rapide !
« Le deuxième assaut a été effectué avec des ensembles en circuit ouvert. (…) Ils ont eu quelques problèmes avec la formation de glace dans les masques, mais Hillary n’a eu aucune difficulté à corriger cela. Hillary a décrit comment il a retiré son masque à oxygène au sommet et a pu régler les vitesses d’obturation de son appareil photo et prendre des photos. Mais au bout de dix minutes, il remarqua qu’il tâtonnait et s’emmêlait, alors il remit son masque.
Que se serait-il passé s’il n’avait pas rétabli son approvisionnement en oxygène, nous ne le savons tout simplement pas. Quoi qu’il en soit, il est clair que l’oxygène a joué un rôle essentiel dans l’ascension finale ».
Illustration © [cropped] Dirk Pons – CC BY 2.0 via Wikimedia Commons