C’est une première française en Himalaya et pas n’importe laquelle. Le 27 avril 1962, la fine fleur des alpinistes tricolores de l’époque atteint le sommet du Jannu.
Ce sommet de 7.710 mètres d’altitude se situe au Népal, à proximité du Kangchenjunga. L’aboutissement de plusieurs années de préparation pour vaincre une montagne connue pour sa technicité. En 1957, une première reconnaissance menée par Guido Magnone. Puis en 1959, c’est Jean Franco qui dirige une nouvelle équipe française qui atteindra tout de même les 7.350 mètres. L’équipe de 1962 sera la plus forte, elle parviendra à franchir les difficiles sections de glace qui avaient contraint l’expédition de 1959 à faire demi-tour (en plus des problèmes de santé du chef d’expédition). C’est Lionel Terray, déjà présent trois ans plus tôt, qui a pris la direction des opérations. Dans son équipe, rien moins que Robert Paragot ou encore René Desmaison, deux grands alpinistes de l’époque. Le premier avait fait ses armes quelques années plus tôt dans la face sud de l’Aconcagua dont il s’était tiré – par miracle et contrairement à ses camarades – sans amputation. Le second a déjà un palmarès impressionnant, fait de nombreuses ouvertures de voies dans les Alpes, notamment avec son compagnon de cordée Jean Couzy. Aux côtés de Terray, Paragot et Desmaison, on trouve Paul Keller, André Bertrand, Yves Pollet-Villard, Maurice Lenoir ou encore Jean Ravier.
[Archives INA] Découvrir des images de cette première ascension du Jannu
Printemps 1962 au Jannu
Le camp de base est installé à 4.800 mètres environ et c’est de là que partent les dizaines de sherpas qui transporteront 15 tonnes de matériel vers les camps supérieurs. Ils seront au nombre de 6. Six camps d’altitude pour permettre d’atteindre le sommet, dont le dernier à 7.300 mètres est ouvert le 18 avril. Des passages compliqués ne doivent leur succès qu’au dur labeur des sherpas. Ces derniers achemineront notamment plusieurs troncs d’arbres pour enjamber une crevasse impressionnante. Le 27 avril, trois Français et un Sherpa sont au sommet. Le lendemain, d’autres membres de l’équipe se succèdent au sommet. Quelques semaines plus tard, Yves Pollet-Villard alors maire de La Clusaz, envoie une lettre à sa famille, publiée dans Le Monde du 16 mai 1962 : « C’était tout de même difficile. Depuis plus de vingt-cinq jours nous vivions à 6 000 mètres. Aussi avions-nous hâte de redescendre vers l’herbe verte et les vallées. Nous avons des chances de gagner Daran avant la mousson. Lionel Terray espère arranger le retour de manière que l’on fasse escale à Athènes » écrit-il après quelques détails sur l’organisation de l’ascension. Le sommet est si effilé que les grimpeurs ne peuvent s’y tenir debout. La célèbre photo du jour J immortalise donc les alpinistes assis !
Suite à cette expédition, il faudra patienter près de 12 ans avant que d’autres alpinistes foulent le sommet du Jannu. Et surtout en 1978 pour que quatre Britanniques grimpent la voie des Français en style alpin. Sans la lourde logistique des cordes fixes, les nombreux sherpas et sans les bouteilles d’oxygène. La réussite de 1962 était déjà un exploit, celle de 1978 monte le niveau d’un cran.
Illustrations – Le Jannu © C. Nebel via Wikimedias – CC BY-SA 3.0 (change:B&W)