Le 29 mai 1953, Tenzing Norgay et Edmund Hillary sont les premiers hommes à réussir l’ascension du Mont Everest, la plus haute montagne de la planète.
Plusieurs décennies plus tard, Tenzing Norgay donnait une interview sur l’antenne de Kurseong de la radio indienne All India (pour écouter cette interview en tibétain, c’est par ici). La version intégrale traduite en anglais est disponible sur les pages du Nepalitimes.
« Le recruteur britannique m’a choisi »
Il raconte notamment comment il a été recruté en 1935 à Darjeeling par l’expédition d’Eric Shipton. En « 1935, l’alpiniste britannique bien connu, Eric Shipton, est arrivé à Darjeeling. Il voulait recruter 20 à 25 Sherpas pour une expédition sur le versant tibétain de l’Everest. Il a choisi des hommes très forts et expérimentés avec de bonnes lettres de référence. Moi, j’étais jeune et n’avais aucune référence. J’étais là juste au cas où et je ne m’attendais pas vraiment à être recruté. J’avais 18 ou 19 ans… mais le recruteur britannique m’a choisi. À cette époque, le Népal n’était pas ouvert aux étrangers, en particulier aux hommes blancs. Nous avons dû traverser le Sikkim pour atteindre l’Everest. J’ai été embauché pour des expéditions Everest sans interruption pendant trois années consécutives en 1935, 1936 et 1937. »
« J’étais triste pour Raymond »
Il évoque aussi l’expédition de 1952 avec les Suisses. En « 1952, le roi Tribhuvan a ouvert le Népal aux étrangers, y compris les alpinistes. Les Suisses ont reçu la permission de gravir l’Everest cette année-là et je les ai rejoints. (…) Notre réalisation cette année-là était tout à fait remarquable. Nous avons atteint une altitude de 8.600m sans oxygène [NDLR : De l’oxygène a été utilisé lors de cette expédition]. Nous n’avions qu’un seul ensemble de vêtements et une petite tente. Le grimpeur franco-suisse Raymond Lambert et moi partagions une tente. Il faisait extrêmement froid. Nous avons essayé de nous garder au chaud en nous frottant les mains et le corps. (…) Il ne parlait pas anglais et je ne comprenais pas le français. Nous avons donc utilisé des gestes des mains, des yeux et de la bouche pour communiquer et nous avons réussi. [Quand] nous sommes descendus. Je me sentais vraiment mal pour mon ami parce que je savais qu’il n’aurait pas d’autre chance. Je n’étais pas trop inquiet pour moi car j’étais embauché pour revenir l’année suivante avec les Britanniques. J’étais triste pour lui parce que nous avions travaillé si dur. »
Les drapeaux du sommet !
Parmi les anecdotes qu’il évoque, il parle notamment des drapeaux plantés au sommet en 1953.
« Nous avions passé du temps à l’aéroport de Katmandou pour remballer les bagages. J’ai vu alors un certain nombre de drapeaux britanniques dans leurs bagages. Leurs sacs à dos portaient également des drapeaux anglais. J’ai pensé qu’il devait y avoir une bonne raison. Un jour, alors que nous étions au marché de Katmandou, j’ai acheté un drapeau indien et un drapeau népalais. Lorsqu’Hillary et moi nous préparions pour la dernière partie de notre ascension, le chef d’expédition John Hunt nous a remis un drapeau britannique. Charles Evans a produit un drapeau des Nations Unies, je ne sais pas d’où il le sortait. J’ai sorti mes drapeaux népalais et indien ! John Hunt m’a demandé de prendre tous les drapeaux et de les déployer lorsque nous avons atteint le sommet ». La présence des drapeaux népalais et indien ne tenait donc pas à grand-chose…
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Illustration © Dirk Pons CC BY-SA 3.0