Alors que les communes de l’Oisans réfléchissent à un projet de télécabine reliant le Bourg d’Oisans et l’Alpe d’Huez, retour sur un autre téléphérique de la région, aujourd’hui disparu. Celui de la mine de l’Herpie.
Relier l’Alpe d’Huez et le Bourg d’Oisans en téléphérique ? Mais ce n’est pas qu’un projet actuel, la ligne a déjà existé. Il s’agissait alors d’une installation industrielle, pour desservir une mine. Sur les hauteurs du Bourg d’Oisans, les paysans connaissaient depuis des siècles les gisements d’anthracite. Pour leurs propres besoins, ils venaient extraire un peu de charbon. Mais c’est vraiment au début du XXème siècle que l’exploitation industrielle de cette mine a débuté. Située entre 2.100 et 2.800 mètres, elle est alors la plus haute mine de charbon d’Europe. L’exploitation est majoritairement hivernale, quand le gel sécurise l’extraction. De 60 à 150 mineurs pouvaient travailler sur place, en partie des paysans du coin que la misère contraignait à multiplier les boulots.
Un téléphérique pour la petite mine de l’Herpie
Pour acheminer le minerai, un téléphérique est construit. Il est mis en service avant 1910 et relie la mine à la vallée. Transformée en 1918, l’installation atteint finalement le Bourg d’Oisans et une usine où le charbon était séparé des autres minerais. Il transporte aussi les mineurs dont la plupart ne savent pas skier. En hiver, ce téléphérique sommaire est leur seule porte de sortie.
Avec près de 15.000 tonnes produites par an, la mine est petite. Deux galeries de quelques centaines de mètres, des wagonnets poussés par des hommes, des mulets qui prennent le relais et un filon qui affleure sur les pentes de la bien nommée Combe charbonnière. Au pied du Pic de l’Herpie qui dépasse de peu les 3.000 mètres d’altitude.
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La catastrophe de l’hiver 1950
L’hiver 1950 est particulièrement rude avec des chutes de neige très abondantes. Dans la nuit du 8 au 9 février 1950, les mineurs dorment. La plupart sont dans le bâtiment principal, une quinzaine dans une bâtisse secondaire érigée par des prisonniers allemands pendant la Grande Guerre. Une avalanche s’abat alors sur un dortoir chauffé par des braseros. Six hommes meurent écrasés par le bâtiment. Six autres succombent brûlés par des braseros renversés par l’avalanche. Du bâtiment écroulé, seuls deux mineurs sortent vivants. Le petit village de Besse-en-Oisans est le plus touché, la plupart des hommes décédés venaient de là.
La fin de la mine de l’Herpie
Sa rentabilité était déjà en berne avant la catastrophe mais cette dernière aura précipité la chute de la mine de l’Herpie. En 1951, l’exploitation ferme. Le démantèlement des installations débute dans la foulée en plusieurs phases. En 2009, certains vestiges rouillés étaient encore retirés du secteur. Il ne reste désormais plus grand-chose du téléphérique de l’époque. Quelques pièces métalliques ou ruines de bâtiments seulement. Le charbon, lui, est toujours visible à plus de 2.000 mètres. Des éboulis plus sombres que les autres rappellent, encore aujourd’hui, le passé de la mine de l’Herpie. En hiver, les skieurs qui empruntent la piste noire de Combe charbonnière traversent sans le savoir les lieux d’une tragédie.
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