Dans l’Himalaya, le Bhoutan base une part significative de son développement sur ses exportations d’électricité. Mais pour combien de temps encore ?
Petit royaume au cœur de l’Himalaya, le Bhoutan base l’essentiel de son développement sur ses exportations d’énergie. L’hydroélectricité, permise par la topographie montagneuse du pays, est devenue une source majeure de revenus. En 2021, 75% de l’électricité produite au Bhoutan était exportée chez le voisin indien. Conscient de la manne potentielle pour le pays et son développement, les autorités bhoutanaises ont lancé plusieurs projets hydro-électrique d’ampleur. Les deux plus importants, totalisant plus de 2.200 MW de puissance, promettent au pays des perspectives économiques enviables. Ou plutôt promettaient.
Car les retards accumulés, à cause du covid mais aussi de difficulté sur le terrain, ont dramatiquement renchéri le coût de la construction. La construction de ces deux barrages a ainsi vu son budget multiplié par 2 à 3. L’inflation a également contribué à cette hausse. Une évolution qui devra forcément être répercutée dans les tarifs de l’énergie. La question qui agitait l’opinion bhoutanaise ces dernières semaines est donc tournée vers le pays voisin. L’Inde continuera-t-elle à acheter l’électricité du Bhoutan, même si son prix est démultiplié ?
Lire aussi : la principale centrale hydroélectrique du Bhoutan est à l’arrêt
L’Inde continuera-t-elle d’acheter l’électricité du Bhoutan ?
La réponse n’est pas si évidente même si le Kuensel, journal local, souligne les besoins importants de l’Inde. Le géant voisin a d’ailleurs lancé plusieurs projets d’ampleur pour être moins dépendant de ses fournisseurs. Une ambition qui pourrait bien éclipser les capacités de production du Bhoutan : l’Inde compte bien produire 500 GW supplémentaires avant 2030. Soit près de 230 fois ce que les deux barrages actuellement en construction au Bhoutan pourraient théoriquement produire. Mais ces projets s’orientent principalement dans le secteur du solaire et de l’éolien. Deux sources d’énergie intermittentes, contrairement à l’hydroélectricité. Au Bhoutan, on veut donc croire que l’électricité produite dans le pays sera toujours indispensable à son voisin notamment pour faire face à cette intermittence.
Aujourd’hui, l’Inde compte encore majoritairement sur le charbon pour sa production d’électricité. La « transition écologique » du sous-continent intègrera-t-elle le Bhoutan ? Si ses tarifs ne sont pas compétitifs, rien n’est moins sûr. Car le pays a d’autres pistes pour de l’énergie no-intermittente. Notamment en nucléaire. Les travaux actuellement en cours en Inde portent sur une puissance de quelques 15.700 MW. L’équivalent de 7 fois les projets hydroélectriques bhoutanais. En attendant, le petit royaume de l’Himalaya a besoin de continuer à vendre son électricité à l’étranger. A fin décembre 2021, la dette extérieure du Bhoutan était majoritairement générée par les remboursements de prêts nécessaires aux travaux hydroélectriques. Des prêts consentis en grande partie par… le gouvernement indien.
Illustrations © Pixabay